Réactions à l’offensive tous azimuts contre l’ostéopathie
Nous assistons depuis quelques mois à une série d’attaques médiatisées sur l’ostéopathie ou plutôt sur les ostéopathes, et si l’on faisait montre de quelque mauvais esprit, on pourrait y voir comme un plan organisé alors qu’il s’agit sans doute uniquement d’une série de coïncidences regrettables. Bien évidemment !!
Quoiqu’il en soit, la profession et ses représentants balancent entre l’agacement, la révolte, voire la crainte de prémisses d’une future légitimation de la disparition de notre métier…
Au sujet de ces craintes, rassurons-nous, aucun gouvernement ne pourrait d’un trait de plume supprimer 30.000 professionnels dont le statut est assuré malgré tout par le RPPS en cours. Le nombre d’obstacles juridiques empêcherait toute velléité en ce sens, à minima un reclassement devrait être organisé.
Par contre, ce phénomène marque cruellement le fait que depuis 2014 et les décrets sur la formation et ses arrêtés, aucune évolution favorable pour ancrer notre profession n’a été réalisée. Et ceci alors même que la voie était ouverte et il aurait fallu, nous le pensons, la force de l’unité de la profession pour aboutir à un statut sécurisé.
A noter que ce n’est pas tant l’ostéopathie en tant que pratique qui est attaquée, puisque les médecins et masseurs-kinésithérapeutes qui l’exercent ne semblent pas encourir les foudres de ce déchaînement, mais bien la présence d’ostéopathes exclusifs dans le paysage de l’offre de soins en France, et où l’on pointe « l’exception française » voire « l’anomalie » de notre situation.
Or, de deux choses l’une : soit l’ostéopathie est efficace, et les ostéopathes sont légitimes, soit elle n’est que de la poudre aux yeux, et les professionnels de santé qui la pratique doivent arrêter de la pratiquer !
Ni l’une ni l’autre de ces propositions ne semble être recherchée en haut lieu…
Nous pensons que la réalité est autre :
- il existe sans doute une forme de jalousie pour certaines institutions médicales et paramédicales à voir une profession autonome, de première intention, à tarifs libres, se développer et croître régulièrement avec une image très positive dans la population…
- de ce fait, si l’ostéopathie échappe aux institutions de la santé, et devient une voie alternative de prévention et de traitement, c’est tout un système qui risque d’en pâtir, et les freins se développeront sans cesse, ce à quoi nous avons assisté sans relâche dans les différents processus ministériels en 2013/2014 !!
Ensuite il nous paraît intéressant de s’appuyer sur un certain discours rabâchant que « les ostéopathes ne sont pas des professionnels de santé » Notons à ce titre que les professionnels de santé qui exercent l’ostéopathie sont les moins formés à la discipline, 120h pour les anciens DIU pour médecins et 900 h maxi pour les kinés !!
Mais dans cette logique, pourquoi ne pas jouer le jeu ? Pourquoi ne pas dire : Chiche ! Nous avons une formation solide de 4860h, selon une maquette longuement travaillée et validée par les ministères de la santé et de l’enseignement supérieur, donc demandons à accéder au statut de profession de santé ! Et tout le monde alors sera content ! L’ouverture de la notion de « professions intermédiaires » dans le domaine de la santé, l’émergence de compétences et « pratiques avancées », la refonte des études de santé et l’harmonisation européenne sont des voies qu’il aurait fallu investir il y a déjà de nombreuses années, afin d’aboutir à un statut solide et inattaquable.
Selon les standards européens, une formation supérieure de plus de 5 ans (pour peu que l’ostéopathe diplômé s’engage dans un DU) et atteigne donc 6000h de formation et le nombre d’ECTS correspondant, c’est tout naturellement dans le cadre d’une profession médicale qu’il ralliera (voir les sage-femmes).
Malheureusement, nos positions depuis la création de la CNO n’ont pas été suivies par les autres organisations, et sans l’unité de la profession, aucune avancée majeure ne pourra être mise en place.
Nous pensons en effet que ce qui mine la profession, c’est sa non intégration dans le système de santé (Code de la Santé Publique) et un certain nombre de règles sont nécessaires à cette reconnaissance
En premier lieu, l’existence d’une voie universitaire est incontournable : l’universitarisation des professions de la santé est un passage obligé, plus qu’une reconnaissance scientifique qui, dans le cadre d’une intervention manuelle, ne s’y prêtera jamais.
Or le fait qu’il n’existe que des écoles privées, sans voie universitaire régulée (diplôme d’état, concours d’entrée, concours de fin de cursus national, voire numerus clausus) empêche grandement l’ouverture à la voie de la reconnaissance comme profession de santé. Entre autres il n’existe aucune équivalence vers un Master ou une voie doctorale, alors que d’une manière contestable, les professionnels de santé bénéficient de larges dispenses pour obtenir un titre d’ostéopathe très éloigné des exigences de la formation !!
Nos jeunes confrères et consœurs (parfois moins jeunes) qui ont eu le courage d’aller vers un doctorat (biomécanique, ingénierie, etc) se sont heurtés au néant de leur diplôme pourtant délivré au nom de l’état afin d’exercer une profession de la santé dont la formation est adoubée et régulée par les deux ministères de l’enseignement supérieur et de la santé...Seul le bon vouloir et la discrétion du président des universités d’accueil ont permis à ces vaillants défenseurs de l’ostéopathie de devenir docteurs, voire maîtres de conférence…
Il est donc une exigence fondamentale, celle de l’intégration universitaire avec l’adoption d’un format LMD, des passerelles, des ECTS, etc, etc.
Combien nous nous sommes sentis seuls à défendre cette option, et si nous l’avions tous porté, ce qui ne serait que justice, peut-être aurions-nous déjà abouti !
Mais il semblerait que certains intérêts financiers auraient pâti de l’éclosion de voies universitaires ouvertes à tous, pour un coût 10 à 15 fois inférieur à celui des écoles !!
En parlant des écoles justement, l’absence totale de régulation malgré les « bonnes intentions » gouvernementales est un scandale absolu, y compris les promesses récentes balayées par quelque recours administratif...teintés de lobbyisme !!
Si nous voulons être acceptés, reconnus, il nous faut un haut niveau de formation et d’exigence...Or nous avions, en 2013, demandé une formation à la pédagogie pour les enseignants des écoles d’ostéopathie : cette proposition a été classée verticalement ! Le milieu universitaire nous reproche cet aspect : comment enseigner à des bac+5 sans aucune validation d’une formation à la didactique, à l’enseignement et à la pédagogie ? Avec beaucoup de courage, nombre de nos consœurs et confrères enseignants ont fait cette démarche individuelle à travers des DU ou masters en sciences de l’éducation, mais cette louable intention ne peut égaler un cursus institutionnalisé de « formation de formateurs ».
Cette recherche d’excellence est incontournable tant pour les formateurs que pour les futurs ostéopathes !
C’est pourquoi le partage du titre, à notre sens, a été une grave erreur, le rapport de l’IGAS de 2010 avait pointé clairement cette anomalie, mais tout le monde l’a mis sous le tapis, et parfois même au sein de notre profession ! Car bien évidemment il est impossible d’exiger un niveau Master voire Doctorat si cette notion « d’usage de titre » reste en l’état et est déconnectée de la qualité de professionnel de santé ! Comment amalgamer un manipulateur en électro-radiologie avec un DO formation initiale et ses exigences ? Qu’il y ait des passerelles et des VAE, bien sur, mais pas un système de partage du titre qui ferme toute émergence d’une profession autonome de haut niveau !
Nous avons accepté tant de contradictions imposées,de réductions et d’amalgames,avalé tant de couleuvres (agrément des écoles…) que la situation actuelle est le résultat de nos renoncements, de nos faiblesses, voire de nos démissions vis à vis des pouvoirs publics et des lobbies des autres professions de santé, et des intérêts financiers.
En 2003, avec la Coordination Nationale des Ostéopathes, nous étions à deux doigts de l’unité...La Chambre Nationale des Ostéopathes est née de la Coordination, a dépassé en quelques années le millier d’adhérents, puis lentement a perdu son audience car chacun a voulu garder son pré carré, association ou syndicat, alors que l’union vers une seule structure était en marche...Plus tard nous avons cru, qu’avec l’UPO, nous allions aboutir, mais le soutien de cette dernière aux écoles pour professionnels de santé nous mettait en porte à faux avec nos statuts, c’est-à-dire la création d’une profession autonome et exclusive d’une autre profession de santé (et que l’on ne vienne pas dire que c’est utopique, l’Italie et Monaco l’ont fait, entre autres…)
Le double exercice sera toujours une laisse empêchant le « toutou » ostéopathie de prendre sa liberté, elle lui laissera simplement assez de mou pour rentrer à la niche !!
Dans ces conditions, nous pensons qu’il est grand temps, et peut être une dernière fois, de parvenir à l’union de toutes les forces ostéopathiques autour d’un projet clair, un consensus sur le statut et la formation, nous croyons que c’est possible, mais au-delà , c’est nécessaire car comme nous pouvons le penser : « L’avenir n’est pas ce que l’on veut, mais ce que l’on poursuit ».